Madagascar. Claudinegate: Ce n’est pas du deux poids deux mesures

Mardi, 23 Mai 2017 17:01 Analyse
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Le regard qui voit le combat de l’appareil judiciaire malgache contre le cas Claudine Razaimamonjy comme un acharnement sur une personne, est une erreur d’appréciation.

D’abord, il ressort de la faille du système politique du pays. Hery Rajaonarimampianina, candidat par accident à l’élection présidentielle à deux tours de 2013, a dû faire face aux défis du scrutin dans lesquels il était engagé. L’argent étant le paramètre le plus déterminant, il s’est retrouvé à nouer des alliances avec des sponsors de circonstances, ayant en dernier souci l’aspect politique (Politique dans son sens noble de recherche du bien commun de la population d’un pays) du partenariat. Le rapprochement n’a comme mobile que le retour sur investissement des sommes engagées. D’où le placement, aussitôt, de personnages comme Claudine Razaimamonjy dans l’entourage officiel du nouveau président de la République. Les dossiers qui l’ont amenée à être interpellée par le Bianco nous révèlent sur sa réelle motivation… En somme, la Claudinegate appelle à revoir le système politique malgache: il faut passer au financement par subvention gouvernementale des partis politiques, cela conduira à une réduction automatique de leur nombre (une formation politique qui n’a pas d’élus est voué à disparaître), et donc l’émergence des vrais partis aptes à diriger le pays selon leur projet de société et programme de gouvernance.

Ensuite, l’affaire Claudine Razaimamonjy relève de la nécessité de refonder la République. Les quatre républiques qui se sont succédées jusqu’ici, ne le sont que de nom. La notion de république n’imprègne que les personnes ayant eu l’opportunité d’assez s’aiguiser en culture politique, soit une petite minorité. Le peuple, lui, est resté des sujets, comme au temps de la monarchie. «Fanjakana» appelle-t-il l’Etat (le numéro un du «Fanjakana» serait donc un «mpanjaka» (roi), et les «mpitondra fanjakana» des «tompomenakely», des «andriambaventy», des «deka», etc.) Madagascar n’a pas fait la transition de la monarchie vers la république; la république a été et demeure un apprentissage sur le tas. Le précédent point rejoint cette aspiration à l’effectivité de la république du fait que, dans ce type de régime politique, les partis sont le centre qui anime la vie publique.

Revenant à l’affaire Claudine Razaimamonjy, dans une république les lois sont le lien qui tisse la cohésion des divers constituants d’une société. Négliger cette valeur intrinsèque aux lois revient à dessouder le vivre-ensemble, en premier lieu entre gouvernants et gouvernés. Cela signifie que désormais nul n’est tenu à se soumettre à de quelconques règles; c’est le chacun pour soi. C’est le message que le régime HVM fait passer en soustrayant Mme Claudine Razaimamonjy de la procédure judiciaire normale.

Enfin, l’affaire Claudine est un repère pour stopper le recul continuel du pays. Il ne s’agit pas de dire pourquoi elle et non pas les autres figures connues des magouilles. Il faut commencer quelque part, à un instant donné. Depuis l’indépendance, la situation du développement, donc du bien-être et mieux-vivre de la population, s’est sans cesse dégradée. De «Pays en voie de développement» que la Grande île fut à la sortie de la colonisation, passant dans les classifications de «Pays sous-développés» et «Pays les moins avancés», Madagascar se retrouve aux derniers épisodes à la catégorie de «Pays pauvres et très endettés». Les multiples difficultés qui assaillent actuellement le régime en place indiquent que l’État malgache est menacé dans son existence. Dans le jargon des relations internationales il y a la classification de ce qu’on appelle les «Etats défaillants». La prochaine étape de Madagascar serait-il la situation de la Somalie au début des années 90?

Hasina A. Raveloson

Mis à jour ( Mardi, 23 Mai 2017 17:05 )