Moustafa Ameralli Radjan. Le balafré, en cavale à La Réunion, suivra-il les traces de Mamodtaky?

Mardi, 07 Novembre 2023 10:49 A la une
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Rappels à propos de Mamodtaky Mamod Abasse


Le 22 avril 2001, à Fenoarivo, banlieue d’Antananarivo sur la RN1, trois individus munis d’armes lourdes tirent sur plusieurs personnes. 5 personnes -dont 2 adolescents- sont tuées et 4 autres sont grièvement blessées. Les victimes font partie de la famille Remtoula, membre de la communauté indo-pakistanaise à Madagascar, toutes de nationalité française. Dont Anita Remtoula, propre épouse de Mamodtaky. Il semblerait que cet assassinat de masse s’est basé sur « des différends conjugaux »… Parti en cavale à La Réunion, Mamodtaky revient à Madagascar en octobre 2002. Pourquoi ? Suite aux aveux de son beau-frère, Khizar Abbas Khan, la justice malagasy fait bénéficier Mamodtaky d’un non-lieu. Seulement, il est immédiatement expulsé de la Grande île.

Mamodtaky disparait alors des radars et, un an après, en octobre 2003, Anita, son épouse rescapée de la tuerie de Fenoarivo, porte plainte auprès de la justice française. L’enquête est reprise. Grosse surprise en novembre 2004 : Khizar Abbas Khan, le beau-frère -qui avait été déclaré mort dans une prison de Madagascar- est arrêté en région parisienne ! Ramené à La Réunion, il y est mis examen et incarcéré pour faux témoignage et complicité de meurtre.

Et Mamodtaky, diriez-vous ? En fait, depuis tout ce temps, il vivait clandestinement à Madagascar et ne sera découvert qu’en avril 2005. 3 mois après, il est extradé en France, transféré à La Réunion, y est mis en examen puis est écroué.

Après tout un micmac qui pue la corruption (cherchez et vous trouverez sur Google), Mamodtaky est à nouveau arrêté le 15 septembre 2009, à… Madagascar. Eh oui. En mars 2010, il est de nouveau extradé en France où il est condamné à la prison à vie par la cour d'assises de Paris. Mais, le 15 février 2013, il passe devant la cour d'assises du Val de Marne, cette fois-ci, où sa condamnation à vie se mue en 28 ans de prison dont 15 ans avec sûreté.


Dernier coup de théâtre : le 30 mars 2017, devant la Chambre d'application des peines de Paris, Mamodtaky avoue -enfin- avoir été le commanditaire de cet horrible assassinat collectif des membres de la famille de son épouse. Machiavélique jusqu’au bout, il espère une réduction de sa peine.

Et la grande question est : qu’en est-il exactement et où est Mamodtaky en ce mois de novembre 2023, 10 ans après le verdict de la cour d'assises du Val de Marne, en France ? Car s’il ne va pas jusqu’au bout de sa peine méritée, il reste toujours un danger pour la société.

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Moustafa Ameralli Radjan

Le 06 novembre 2023, cet indo-pakistanais comme Mamodtaky, a été condamné par le PAC (Pôle anti-corruption) d’Antananarivo) à 10 ans de travaux forcés et 5 années d’interdiction de séjour pour corruption active et d’exportation illicite de lingots d’or. Toujours en liberté, pour le moment, ce personnage est donc encore plus dangereux que le commanditaire de la tuerie de Fenoarivo.


Comme vous pouvez le constater sur le mandat d’arrêt, en date du 07 Octobre 2020, ci-dessus, Moustafa Ameralli Radjan a été inculpé pour association de malfaiteurs, de détention illégale de kalachnikov et de séquestration de personne.

Concernant ce dernier crime, Moustafa et son complice, Dilavarhoussen, avaient déjà écopé de 20 ans de travaux forcés, selon l’arrêté N° 706 du 03 novembre 2021. La preuve tangible et réelle que Moustafa Ameralli Radjan est vraiment le cerveau de toute la série de kidnappings qui a eu lieu en milieu urbain, à Madagascar, est celle-ci : depuis le décès de Danil Radjan, le 20 septembre 2020, il n’y a plus eu aucun rapt dans les grandes villes de la Grande île. Les rapts effectués en zones rurales ne sont que des copiés-collés faits par des bandits qui agissent dans le feu de l’action et non pas selon un plan bien établi, bien réfléchi concernant les cibles.

Radjan Brothers. La face cachée des maîtres des affaires louches à Madagascar

Le 19 septembre 2020, le corps sans vie de Danil Radjan, «karana» (étranger d’origine indo-pakistanaise) de nationalité française, était donc trouvé dans le parking souterrain du centre commercial « La City » à Ankorondrano Ivandry. Qui était Danil Radjan ?

Il était le frère de Moustafa Radjan, ayant fait l’objet, le matin du 13 novembre 2017, d’un attentat du côté d’Ambatobe. Ayant été atteint de trois balles d’arme à feu, il s’en est sorti miraculeusement indemne mais garde une très vilaine balafre au visage, assez difficile à dissimuler. Maintenant, qui sont les frères Radjan (« Radjan Brothers ») ?

En 1995, alors que Moustafa Rajan n’est encore qu’un étudiant, son frère Danil travaillait chez un de leurs oncles. Il s’occupait alors de ses relations administratives. Sa position lui avait permis d’escroquer son propre oncle ainsi que ses associés, en inventant de faux problèmes (avec le fisc, la douane, le BIANCO -Bureau indépendant anti-corruption-, la douane...). Cela lui a permis d’amasser un énorme pactole. En 2002, à la suite d’une enquête diligentée par le BIANCO, cet oncle décide de quitter Madagascar. Du coup, Danil et Moustafa Radjan, en « héritiers », ont empoché une bagatelle d’argent chiffré à plusieurs millions de dollars américains qui auraient dû revenir à cet oncle trop confiant. Avec ce pactole, les « Radjan Brothers » montent une société sans nom, sans enseigne, sans activité précise, qui, pourtant, sera plus que lucrative… Mais dans le monde des affaires en général, Danil Radjan a eu la renommée d’avoir été un usurier, prêtant de l’argent à ceux dans le besoin -et ils étaient nombreux- avec un taux d’intérêt mensuel variant entre 5% à 10%.

En 2008, ils s’activent dans le trafic d’or. De quelle manière ? Ils subtilisent tout simplement les cargaisons d’autrui. En 2009, ils ont réussi à détourner pour leur profit, une cargaison de 20 kg d’or, qui leur a permis d’empocher deux milliards d’ariary de l’époque. Peu de temps après, grâce à une chaine de corruption qu’ils ont établie au sein des forces de l’ordre, ils ont diligenté une équipe de policiers pour intercepter une cargaison de 20 kg d’or à Maevatanàna et l’ont détourné vers Dubaï par la suite. Résultat de cette opération ? De nouveaux milliards d’ariary raflés au passage…


Les « Radjan Brothers » n’ont jamais rechigné sur des affaires illégales mais lucratives pour eux. Ainsi, ils ont bel et bien œuvré dans les affaires de kidnapping de toute la décennie passée. Pourquoi, en effet, s’arrêter en « si bon chemin », n’est-ce pas ? Et les personnes les plus ciblées, capables de payer des rançons d’un montant faramineux pour le commun des malagasy, ont été issues de la communauté indo-pakistanaise de Madagascar, les « karana ». Le jackpot assuré. Avec l’appui très intéressé de Dilavarhoussen Reza dit « katraka », ils ont semé la terreur, l’angoisse et la peur au sein dans toutes les communautés « karana » de Madagascar, que ce soit chez les Bohras, les Hindous, les Ismaelis ou les Khodjas… En état de stress permanent, tous les membres des familles riches de ces communauté n’avaient plus qu’une question en tête : « à qui le tour maintenant ? Qui sera le prochain kidnappé ? »… Si vous prenez le temps de lire et relire les archives des journaux de l’époque, vous constaterez qu’une famille, en l’espace de deux années a vu quatre de ses membres kidnappés contre rançon.


Et, à y voir très clair, il m’est apparu qu’une famille a été épargnée par ces vagues de kidnapping qui ont défrayé la chronique. Devinez laquelle. Oui, c’est celle des « Radjan Brothers ». J’ai eu beau chercher mais le constat est le suivant : aucun de leur proche ne figure sur la longue liste des victimes d’enlèvement et de séquestration contre rançon. Danil et Moustafa ont-ils eu un élan de pitié pour leur famille, alors qu’ils avaient pourtant grugé sans vergogne l’un de leurs oncles ? Le mystère reste entier…

En 2010-2011, sous la transition dirigée par Andry Rajoelina, ils sont incarcérés dans la maison de force située à Tsiafahy, suite à l’affaire des bombes artisanales qu’ils avaient financée et à la suite de quoi des bombes avaient été posées un peu partout. Ils ont également été les financiers de la tentative du coup d’état au camp de la base aérienne BANI (Base aéro-navale d’Ivato). Là, ils ont pénétré dans le domaine de la politique, avec la volonté manifeste d’écarter le Président de la Transition. Et peut-être pire encore.

Par la suite, grâce encore à un système de corruption « élevée » (à coups de millions d’ariary assurément), leur relation étroite avec certaines personnes de la SAMIFIN (« Sampandraharaha Malagasy Iadiana amin'ny Famotsiam-Bola » ou Service de renseignement financier malagasy) leur a permis de s’enrichir encore plus de façon illicite voire criminelle gracieusement, sans jamais avoir été inquiétés. Du coup, des personnes issues de toutes communautés confondues ont été prises pour cibles, certaines faussement accusées de blanchiment d’argent. Parallèlement, entre 2007 à 2010 (donc, sous le Président Marc Ravalomanana déjà), les « Radjan Brothers » ont pu réaliser des transactions fictives d’un montant égal à 100 millions de dollars américains.


A présent, s’il y a une justice en ce bas-monde, nous nous posons tous la même question : laquelle  de justice est-ce ?

En tout cas, une chose est certaine ici-bas : tôt ou tard, nous serons payés en retour des actes que nous avons commis et commettons, que ce soit en bien ou en mal, et de manière inattendue, en partant du principe que si les voies du Seigneur sont insondables, Il sait tout, Il voit tout et agit selon vos propres agissements. Tel est l’objet de ce dossier. Ainsi, réveillez votre conscience et n’espérez jamais être récompensés pour des actes maléfiques. Car si la justice humaine comporte des failles certaines, la justice divine, elle, est immanente.

Le 13 novembre 2017,  Moustafa Radjan avait échappé de peu à la mort. En pleine rue, à Ambatobe, deux motards avaient ouvert le feu sur lui, avec un fusil à pompe de calibre 12 mm en le visant dans sa voiture (Lequotidien.re)

Pour les éternels sceptiques, je signale que les faits cités plus haut ne sont que la face visible d’un profond iceberg d’actes de banditisme tous aussi mafieux les uns que les autres signés « Radjan Brothers ». A présent, la question sur toutes les lèvres : où se trouve Moustafa Radjan actuellement (novembre 2023) ? A La Réunion, chers lecteurs, une connaissance l’a croisé et l’a reconnu, à cause justement, de cette balafre qu’il tente, tant bien que mal, de dissimuler avec soit un masque soit un foulard.

Les frontières actuelles de Madagascar étant ce qu’elles sont, et étant toujours à la tête d’un pactole très bien mal acquis, qui nous dit que Moustafa Radjan ne fait pas le va-et-vient La Réunion-Madagascar et vice et versa ? Comme l’avait fait Mamodtaky en son temps ? Peut-être qu’ils ont le même réseau « d’hébergement » ? Qui sait ? La Grande île étant en pleine période pré-électorale.

En tout cas, mon intime conviction a toujours été la suivante : si on ne trouve par un dangereux criminel récidiviste en cavale, c’est parce qu’on ne le recherche pas. Mais tout à une fin. Il y a bien fallu 20 ans pour piéger le tristement célèbre Lama (abattu avec son frère, le 13 mai 2020), le bras armé de Moustafa Radjan. On va voir si, après ce dossier, il va encore usurper de ma signature journalistique, comme il l’a fait sur Whatsapp en novembre 2021. Il y a 2 ans.

Jeannot RAMAMBAZAFY – 07 Novembre 2023

Mis à jour ( Mardi, 07 Novembre 2023 12:12 )