TEMOIGNAGE

Mardi, 04 Août 2009 18:16 Articles
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« L’éducation est un métier noble mais ingrat ».

Je vous donne ici un aperçu de la vie, du calvaire qu’un enseignant fonctionnaire malgache vit chaque jour de sa vie. L’injustice de la politisation de l’administration. Voilà pour vous un témoignage exclusif. 

 

 

 
Les préparations, je dois les faire tous les soir. 
Je m’appelle Mme Georgette. J’ai  53 ans et je suis une enseignante à l’école primaire. J’ai toujours servi dans une école publique durant mes trente années de service. Au total, donc, j’ai déjà éduqué 1500 élèves si on fait une moyenne de 50 par année. Quelques fois je vous jure, j’avais plus de 120 élèves dans une classe. 
Actuellement, je suis dans une école primaire publique dans un village situé à 12 km de la ville d’Antsirabe. Un village qui est très productif en fruits et légumes et qui dont la population a un niveau d’instruction très basse : le collège d’enseignement général a à peine quatre ans et n’ouvrira la classe de troisième que cette année 2009-2010. 
Faute de moyens de locomotion et d’infrastructure routière, je me rends au travail à pieds tous les jours, allée et retour. Incroyable, surtout à mon âge, mais c’est la réalité. Mais quelques fois, des gens de bonne foi me ramène en moto ou en tandem sur leur bicyclette. Mais cela n’arrive que très rarement. 
Je ne nie pas, et tout le monde de mon école et du village où je travaille le sais d’ailleurs, cet effort que j’effectue me rend souvent malade. La fatigue et le stress me guette chaque jour. Mais pour mes élèves que je considère comme mes enfants, je ne cesserai pas de me consacrer.
 
Je me réfère à geaucoup de manuels pédagogique.  
Durant les assises des fonctionnaires qui s’est déroulé au centre de conférence d’Ivato, dernièrement, mes collègues les fonctionnaires ont dénoncé que les affectations ne sont plus décidées selon les besoins, mais sont devenues des outils politiques pour je dirai « punir ». Et je dis que j’en suis une victime, de cette punition. Non seulement, j’ai été soumise à une affectation disciplinaire, mais aussi, je n’ai jamais reçu un titre honorifique, alors que je n’ai jamais été blâmée. Mieux encore ; là où j’ai travaillé, j’ai toujours été considérée comme meilleur enseignant. Or, dans la circonscription scolaire où je travaille, je connais une personne qui a juste deux ans de service et qui a déjà accumulé six honneurs. Je me demande par quelle magie. Dans le règlement qui régit l’attribution des titres honorifiques, selon les peu que je connais, les remises de ces certificats de reconnaissance sont dictées par la bonne conduite de la personne concernée. Ce n’est pas pour le bon plaisir de dénigrer mais plusieurs de mes collègues sont adultères, alcooliques et ils ne le cachent pas  et pourtant, ils en décrochent. Pourquoi ? Ce sont des « Dit oui oui ». 
 
Je vous raconte mon histoire car je sais, nous sommes plus de 100000 fonctionnaires à Madagascar et je sais qu’au moins un bon millier a connu cette situation. Au côté du peuple malgache, je me suis battu pour un meilleur avenir pour les enfants d’abord et pour nous enseignants fonctionnaires aussi.  « L’éducation est un métier noble mais ingrat », je fais de cette citation mienne jusqu’à ce que la situation change car je suis convaincue qu’un changement s’opère. Nous avons déjà choisi la voie pour cela. Elle est toute tracée devant nous. Et je tiens à tirer la sonnette d’alarme avant qu’aucuns de nos enfants ne veuille plus devenir enseignant. 
Textes et photos : R.HASINJO 
Mis à jour ( Jeudi, 27 Août 2009 06:54 )